Une expérimentation déjà encadrée jusqu’en 2025
Pour rappel, le recours à des systèmes de vidéosurveillance assistés par traitement algorithmique avait été autorisé en 2023 à titre expérimental, avec une échéance fixée au 31 mars 2025. Il s’agit d’une innovation mêlant intelligence artificielle et sécurité publique, encadrée juridiquement mais soulevant de vives tensions entre impératifs sécuritaires et respect des libertés fondamentales. Ce système de vidéosurveillance excluant formellement la reconnaissance faciale vise à détecter des comportements ou situations inhabituelles susceptibles de présenter un risque pour l’ordre public.
Un frein de la vidéosurveillance algorithmique en France par le Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel, par une décision du 24 avril 2025, a censuré une disposition législative visant à prolonger l’usage expérimental de la vidéosurveillance algorithmique dans les espaces publics jusqu’en 2027. Cette décision marque un tournant important dans le débat sur l’encadrement des technologies de surveillance en France.
La disposition annulée faisait partie d’un texte de loi sur la sécurité dans les transports, mais les Sages ont estimé qu’elle n’avait aucun lien direct avec le sujet principal de ce projet. Ce procédé, qualifié de cavalier législatif, est contraire à la Constitution française.
Un dispositif censuré pour vice de procédure
Le texte en question s’inscrivait dans le cadre de la loi relative au renforcement de la sécurité dans les transports. Toutefois, l’article relatif à la prolongation de la vidéosurveillance algorithmique a été invalidé au motif qu’il constituait un cavalier législatif. Autrement dit, il ne présentait pas de lien suffisamment direct avec l’objet principal de la loi, contrevenant ainsi à l’article 45 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel confirme par cette décision la nécessité d’un respect scrupuleux du processus législatif, notamment en matière de libertés publiques.
Une vigilance accrue face aux innovations technologiques
La décision du Conseil constitutionnel ne remet pas en cause l’expérimentation actuelle, mais elle empêche sa prolongation par des moyens législatifs inappropriés. Elle rappelle surtout que le déploiement de technologies à fort potentiel intrusif dans l’espace public doit être encadré par une loi conforme aux exigences de clarté, de nécessité et de proportionnalité posées par le bloc de constitutionnalité.
Dans un contexte où l’intelligence artificielle transforme en profondeur les outils de sécurité publique, cette décision incite le législateur à faire preuve de rigueur dans l’élaboration de normes qui touchent aux libertés fondamentales.
Un débat loin d’être clos : Libertés publiques vs. Sécurité, un équilibre délicat
Ce coup d’arrêt ne signifie pas la fin de toute ambition en matière de vidéosurveillance augmentée en France. Mais il impose une exigence claire : toute expérimentation future devra être mieux encadrée, plus transparente, et strictement ciblée. Le gouvernement et les collectivités locales sont désormais confrontés à un défi de taille : concilier innovation et respect des droits fondamentaux, dans un climat où la demande de sécurité n’a jamais été aussi forte.
La France entre ainsi dans une phase de réflexion plus profonde sur la place que doivent occuper l’intelligence artificielle et les outils de surveillance dans une société démocratique. Un débat essentiel, à l’heure où les technologies de contrôle deviennent de plus en plus puissantes, et où leur régulation devient une nécessité impérieuse.